L’Euro de foot ? Bof.
Les J.O. ? Éventuellement.
Mais le grand évènement, celui pour lequel Dard Malin a mobilisé ses brigades les plus secrètes et ses contre-espions d’airain, c’est la finale de la Battle !
Au début de cette dernière manche, je me suis dit : « Tout ça pour ça ? ». Puis j’ai écouté chaque morceau huit fois : sur la route en allant voir Gel, au casque en me baladant, en fond sonore pendant les tâches ménagères (je fais beaucoup plus vite la vaisselle avec Gel et Machine Head, j’essuie plus méthodiquement avec 1000Mods et Wayfarer). Et à la fin, je peux dire que j’ai apprécié chacun des 4 titres.
Mais comment départager un long morceau de stoner, une pièce montée de thrash metal, un haïku de poing hardcore et un western black metal sans passer par le filtre de ses préférences et de ses habitudes ?
Comment passer de la lumière à l’ombre, comment éclairer la seconde et nuancer la première pour écouter Road to burn comme si c’était la première fois, pour entendre dans les autres ce qui (peut-être) nous étourdira demain ?
Un groupe est niché dans ma zone de confort, et je l’ai vu 3 fois en concert : 1000Mods. Les autres sont à l’intérieur ou en bordure de ma zone d’inconfort (une notion avec laquelle, sur un plan général, il faudra composer - si l’on veut aborder au mieux les prochaines décennies), même si j’ai dorénavant une bonne idée de ce qu’est un concert de Gel dans une petite salle : de la vaseline dans une explosion de colère. Oui, la colère peut-être joyeuse : Sami Kaiser uber alles !
1000 Mods
Je connais bien ce morceau. J’aime le son rond et flûté de certaines parties de guitare qui me rappellent le meilleur de Colour Haze. J’aime ce morceau et ce groupe comme l’on aime un compagnon de route. Non pas comme un ami, mais comme une nana ou un type avec qui on a brûlé du macadam, avec qui on a partagé quelques confidences pendant un trajet de nuit entre, disons, ici et là, en sachant que ici l’est Moulineaux et que c’est le là qui donne le la. La nuit porte conseil et les conseils portent la nuit, même s’il faut parfois les épicer un peu. Épices and love, et du cul humain de préférence.
Bémol au menthol : les paroles fumeuses sur la cigarette sont dispensables et disparaissent comme des volutes vite oubliées.
GEL
Le gel sort des tubes, si l’on croit nos habitudes dentaires, mais pas ce Gel là qui ne déroule aucun tube.
Les paroles vous Ramones les cheminées, que ce soit le vit (fait bien fait), le canal auditif ou ce qui nous sert de colonne morale. Histoire d’une relation toxique, le morceau est ancré dans l’époque et dans le me-too itou. "Ce que l’on conçoit bien s’enonce clairement " a dit Boileau et je le confirme, bien que ma deuxième pinte d’ambrée me démarque du buveur d’eau. Gel c’est le dégel des relations interpersonnelles, une grosse dose d’énergie et d’enthousiasme appliquée sur des plaies parfois béantes. Plaie it again (& lick my ass) : ça fait du bien là où ça lasse.
Machine Head
En 1798, John Hunter, naturaliste britannique en mission en Australie, envoie à la cour du Roi le croquis d’un ornithorynque, un animal alors inconnu en Europe. Un bec de canard, un corps de quadrupède, une nature ovipare : tout le monde s’étonne et se méfie.
Machine Head a-t-il voulu écrire sa Bohemian rhapsody ? Une intro solennelle qui fait couler un Sang sacré et ne parvient pas tout à fait à exorciser la tentation de penser - bon sang mais c’est bien sûr ! - aux rois gitans, une montée thrash pas désagréable du tout, un interlude à la guitare acoustique avec des morceaux de violoncelle dedans et un final heavy.
Bon sang saurait-il mentir ? Ce morceau n’est certainement pas moins bon que les autres, mais il me procure (un tout petit peu) moins d’émotions.
Wayfarer
Wayfarer, ça vous annonce un voyage : c’est écrit dans le nom et c’est compris dans les charges (de la cavalerie légère). Ça commence par des dissonances à la Pazuzu, avant qu’un air à la Ry Cooder ne pose l’ambiance. On n’est pas loin d’un Hexvessel (« le vessel qui vous laissera les mains douces pour dégainer le colt »), et il y a ces petites morriconeries (qui n’en sont pas, des conneries) et qui vous enlacent le cervelet à la manière d’un crotale. Ce morceau est léger et pesant, lourd et aérien, entêtant, insidieux. Il a une bonne tête d’atmosphère, moins celle d’Arlety que le rictus d’un Clint un peu vénère.
Pas un ornithorynque, donc, mais du Wayfarer. Le bon et la brute ont dégagé le truand, et réglereront leur compte en sifflotant : la chorale est ok à ok coral.
5 pts : Wayfarer - Vaudeville
3 pts : GEL - Violent closure
2 pts : 1000Mods - Road to burn
1 pt : Machine Head - I am hell (sonata in C#)
Merci à toutes et à tous pour ces 4 morceaux et un grand merci à @karajuju.