À mon tour, un petit report du Roadburn, alors même que c’est ma 5ème édition du festival et que je n’en fais jamais, tant le fest est riche et long, voire impossible, à digérer.
En mode immersion et picorage, cette année : la fatigue physique et mentale des dernières semaines m’a laissé sur les rotules avant même le début de ce demi Roadburn, puisque je ne suis présent que le samedi et le dimanche.
Samedi
De WITCH CLUB SATAN, je n’attendais rien. Comme on dit - ou presque - j’ai vu de l’obscurité et je suis entré.
Bien placé, ce fut un saisissement visuel plus que sonore, même si j’ai bien aimé ce black metal entièrement féminin (guitare, basse, batterie) - malgré un problème récurrent sur la basse.
Habillées de jupes blanches, d’un tricot satanique blanc écru ouvert sur la poitrine et d’un bicorne également tricoté, les filles ont assuré un set fiévreux et intense avec au milieu, un titre calme, Mother sea et une pause après laquelle elles sont revenues en tenue d’Eve ou presque, une culotte couleur chair et leurs longs cheveux noirs dissimulant leur intimité. Une belle surprise pour moi, et un beau set auquel il a été fait honneur au Roadburn, avec saisissement et respect. Qu’en sera-t-il au HF ?
DØDHEIMSGARD
Pour cet album que j’aime beaucoup (Black medium current) et qui sera joué en intégralité, le Terminal est bondé. Le son est malheureusement brouillon et peut être à la hauteur de la production léchée de l’album. Devant les images sepias de plusieurs films muets, c’est un curieux mélange qui nous est offert : veste à paillettes du chanteur, choristes dignes d’un orchestre rock, D.J. et black metal.
Un bon concert, mais qui n’a pas été, pour moi, le ravissement procuré par la dégustation de l’album au casque (sur les chemins d’automne).
VYVA MELINKOLYA
Premiers gros frissons du festival quand Vyva Melinkolya entame I65. Un concert bourré d’émotions (une fan craquera à la fin et hurlera son amour pour l’artiste dans une scène dechirante). De la fébrilité et de la timidité de la part de l’artiste, que l’on sent intimidée. Et pas mal de perplexité de ma part en présence de cette artiste si résolument féminine et gracieuse, alors qu’elle est née dans un autre corps.
Ce fut le premier concert partagé avec @Iko : un très, très beau moment.
STEVE VON TILL
Bref passage par la Main Stage, pour 4 morceaux de cet immense artiste. Comme un Tom Waits qui aurait bu moins de bourbon, et plus d’eau de source. Devant un écran géant et de grandioses images de nature, un très beau Watch them fade par lequel il m’arrive de terminer (ou commencer) mes journées.
UNIFORM
Petite déception pour ce concert, que je n’avais pas prévu de faire en entier et pour lequel ils devaient jouer le dernier album American standard. Mais ils n’ont pas joué les morceaux dans l’ordre et je n’ai pas eu le plaisir d’entendre le morceau-titre, que je préfère aux autres. Un groupe puissant cependant, peut-être un peu perdu sur une trop grande scène, et un chanteur charismatique, sorte de David Byrne plus missile (sol-air) que solaire.
SUMAC & MOOR MOTHER
J’avais privilégié ce projet, pour un très beau concert mélangeant le drone, le hip-hop et le noise. Je me suis perdu dans les méandres du très beau tableau exposé derrière les musiciens, jusqu’à atteindre une douce transe, pris par les pulsations de la musique, les cris, les lambeaux de bruits et la scansion forte et politique de Moor Mother.
ONE LEG ONE EYE
Je me trouve une petite place au balcon du Next, pour prolonger le précédent concert par ce mélange de drone, de voix transformées, de cris d’oiseaux et d’instruments traditionnels irlandais. Un bon moment offert par ce side-project d’un des musiciens de Lankum.
MIDWIFE & THOU
Aimant beaucoup les deux propositions artistiques, et attendant beaucoup de ce concert où l’album No depression in Heaven devait être « réinterprété », je dois avouer que j’ai été déçu. Il m’a semblé que le point de rencontre entre les deux univers se faisait au détriment de ce qu’il y a de meilleur dans chacun d’eux.
Adieu à l’intensité si particulière de Thou, adieu au minimalisme de Midwife. Le bébé ressemble à une suite de power ballads, de Cowboy Junkies pas forcément désiré, avec de trop longues transitions et des morceaux qui traînent en longueur. Quand-même, sur la fin, un Killdozer de toute beauté.
DOODSESKADER
Un fauve en cage, nu, à l’os.
J’ai connu une brève histoire d’amour avec ce groupe, avant et pendant le HF 2023, avant de décrocher peu à peu. Un bon concert pour moi, mais pas un grand concert, décontenancé que j’étais devant cette musique forte, hybride, sincère, mais proposée devant un grand écran diffusant des images kitchs, rose bonbon, jaune acidulé, comme des bouchées poivrées, et des paroles systématiquement écrites, comme dans un karaoke géant. Cependant, la ferveur de ma voisine (par ailleurs co-modératrice du forum du plus grand festival de musique extrême de France) m’a permis de vivre pleinement ce concert. Merci @Iko !
PAGENINETYNINE puis, en fin de soirée, BLIND GIRLS.
Pas forcément ma tasse de thé, mais je voulais voir ce que c’était. Il faut dire qu’il y avait beaucoup plus d’énergie sur scène que dans mes jambes fatiguées par cette longue journée. 9 musiciens sur scène, dont probablement 4 guitares, du HxC mixé avec… des trucs moins HxC, beaucoup de sincérité pour Pageninetynine, et du screamo intense et généreux pour Blind Girls (photo ci-dessous). Je n’étais simplement pas le bon client pour ces deux très, très bons groupes.
CHAT PILE
Deuxième fois que je vois le groupe au Roadburn, et deuxième fois que je reste un peu sur ma faim, alors que j’apprécie vraiment leurs morceaux. Comme le dit @Enufsed, ce groupe n’est peut-être pas fait pour les grandes scènes.
C’était bien, c’était lourd et déglingué mais… en rien différent des morceaux joués sur l’album. Des appartés fiévreux entre les morceaux, un chanteur qui sillonne la scène, quelque chose qui vous prend aux tripes mais aussi, en tout cas pour moi, un petit quelque chose qui manque en concert. Serait-ce le syndrome de la grenouille de l’Oklahoma dont on voudrait à tout prix faire un boeuf ? Un groupe majeur, je crois, mais qui craint les écrins.
Ci-dessous, une photo du groupe en vadrouille dans Tilburg.
(Dimanche - et quel dimanche ! - à suivre).