Compte rendu : Lili Refrain + Kalandra, 29 Septembre, Rex de Toulouse
Lili Refrain
Je ne connaissais pas cette artiste italienne étant venu initialement pour Kalandra. Une entrée paradoxalement discrète et timide sur scène mais la performance qui suit est habitée, possédée. La présence sur scène est limite chamanique.
On est entre la prière au dieu de la pluie et la performance arty. C’est envoûtant, quand on rentre dedans, c’est prenant même si un peu trop perché pour moi par moments. Les rythmes lancinants invitent à la transe, à la libération de l’esprit, à la déconnexion complète avec le quotidien.
Son travail avec les loopers est impressionnant de précision et de talent. Seule sur scène avec trois instruments : guitare, grosse caisse (ou caisse claire, désolé je ne suis pas spécialiste) et clavier. Tous connectés à des loopers pour créer des boucles et des mélodies. Un dernier micro pour la voix et enregistrer quelques samples également avec des percussions (cloche, grelots, …). Malheureusement, le son est loin d’être impeccable, limite brouillon quand trop de boucles se superposent (une constante sur la soirée).
Après deux morceaux, soit environ 25 minutes, une première pause avec des échanges en français puis en anglais (avec un petit accent Italien si charmant) d’une timidité, d’une douceur et d’un humour qui tranchent avec ses prestations.
Lili Refrain joue avec sa voix comme un instrument de musique, c’est le quatrième instrument sur scène mais le plus important, son registre vocal est assez impressionnant et l’utilisation du looper sur sa voix rend tout ceci encore plus bluffant. Une voix de tête avec des aigus comme une soprano d’opéra, des expressions vocales nasillardes comme des chamans indiens, elle sait varier et ceci rend chaque moment d’un morceau unique. Avec Lili même ses respirations deviennent musique.
Lili a une incroyable énergie une fois la guitare dans les mains, les cordes semblent répondre à sa voix, dans une prière onirique à deux dédiée à je ne sais quelle divinité ce soir. Le concert se termine par quelques notes a capella, tous hypnotisés par la voix et les yeux maquillés d’un noir profond de la prêtresse d’un soir.
C’était un moment suspendu auquel je ne m’attendais pas. Mais j’ai parfois décroché, pas complètement client du délire.
Kalandra
La chaleur dans la salle commence à monter.
Les gens sont venus voir Kalandra avant tout, si le concert n’est pas sold out, la foule et la moiteur ambiante semblent indiquer le contraire. (EDIT du lendemain : Le concert était bien Sold Out au final)
Les musiciens installent leurs instruments, je suis toujours touché par ces “petits” groupes qui font tout. S’ils ont quelques techniciens, les membres du groupe sont des touche-à-tout et n’ont pas encore la notoriété suffisante pour n’avoir qu’à arriver au dernier moment devant un public surchauffé.
Je suis au premier rang (ou presque), juste en face du guitariste Jogeir Daae Mæland, et je le vois préparer ses instruments avant le grand moment : Guitare ? Prête. Mediators ? Prêts. Archer ? Prêt. Tout est bon, on repart en coulisse avant le grand saut dans le vide.
Une simple introduction, quelques nappes de son et un démarrage progressif avec l’excellent morceau I am issu du dernier album. Toute de blanc vêtue, pieds nus, Katrine Stenbeek ressemble à un ange tombé du ciel, douce mais rebelle. Ne dites rien à ma femme mais je suis amoureux.
Quelques mots en français, puis pas de répit pour enchaîner sur le très bon The Waiting Game du premier album.
J’avais le souvenir d’une chanteuse timide et sur la réserve, elle a pris énormément d’assurance et d’épaisseur sur scène. L’introduction de State of The World me met des frissons, la voix cristalline de Katrine, le piano délicat, l’archer qui glisse sur la guitare, tout est une ode à un instant de pureté et de grâce. Le temps reste suspendu quand seule subsiste la voix de l’interprète en fin de morceau…
Comme le dit Katrine, il est maintenant « time to rock on », c’est le cas avec le morceau Slow Motion, bien plus rythmé mais qui n’empêche pas d’incroyables envolées de voix. Et c’est sur un deuxième titre du premier album, Naive tout aussi énervé que le concert continue, présence et énergie au rendez vous. Le batteur s’en donne à cœur joie. Pas mon morceau préféré, mais je dois avouer qu’en live ça passe plutôt pas mal.
« It’s time to let it down a little bit » , Borders, l’un des plus beaux titres du premier album, un de ces instants où le temps s’arrête, où plus rien ne compte, juste la voix enivrante de celle qui chante ce soir.
Un problème technique intervient, plus de piano pour le titre suivant. Le bassiste meuble, et enfin le piano revient ! Le tout pris avec humour et philosophie par le groupe.
À nouveau un passage plus calme et poétique, basse, piano, guitare acoustique pour un titre nordique, Selga, qui malgré le froid polaire Norvégien ne refroidit pas la salle, mais la montée progressive de ce morceau est incroyable et laisse tout le monde sans voix . Puis tout s’enchaîne dans cette douceur cachant toujours néanmoins une certaine puissance avec les morceaux typiques de la folk-rock nordique proposés par Kalandra, après tout on vient pour ça. On attend ces passages où les paroles sont incompréhensibles mais nous parlent intérieurement pourtant.
Un interlude instrumental planant, et bienvenu vient conclure ce pur intervalle de musique nordique afin de repartir avec énormément d’énergie pour *Ensom* et *Are you Ready*, la parenthèse calme s’arrête pour ces deux morceaux avant de prendre une dernière dose de douceur avec *It gets easier*. La voix de Katrine Stenbeek malgré la fatigue ne faillit jamais, et c’est une vraie performance après 15 jours non stop sur les routes (Toulouse est la dernière date d’une longue série de concerts où Kalandra est la tête d’affiche). Un cover de Wardruna vient ponctuer cet instant intemporel. Si la voix de la chanteuse est incroyable, c’est à ce moment là que les chœurs du guitariste et du bassiste révèlent tout leur talent. Ce passage à trois voix, en harmonie est une caresse pour les esgourdes. Les vikings n’ont jamais pris Toulouse, sauf ce soir peut être. Que dire également du batteur qui honore avec maestria ces rythmes tribaux ?
*Brave New World*, un tube qui mériterait une meilleure exposition puis *Bardaginn* viennent conclure ce set, une guitare jouée à la perfection (avec un archer, ce qui m’étonne toujours) et la presque-rage au chant de Katrine, c’est extraordinaire (elle est si mignonne, on dirait un chaton qui s’énerve).
Ce concert à double face aussi doux que fort, c’était un concert parfait pour terminer la semaine.
Gros bémol sur la qualité du son pour tout le concert que j’ai trouvé très brouillon.
Setlist :
- I Am
- The waiting game
- The state of the world
- Slow Motion
- Naïve
- Borders
- Segla
- Virkelighetens Etterklang
- Interlude musical
- Ensom
- Are you ready
- It gets easier
- Helvegen (cover de Wardruna).
- Brave new world
- Bardaginn
(Voilà c’est mon premier compte rendu ici, c’est pas les Inrocks ou les Cahiers du Cinéma, j’espère que ça suffira pour « contribuer » au forum, puisque c’est ce qui m’a été demandé)